La mine de Clot Méné
Le rapport KULBICKI (1948).
La mine de fer de Clot Méné est située sur la rive gauche du ruisseau de Laussiès. Elle fut explorée à deux reprises : en 1898 et surtout à partir de 1938. Malgré les moyens employés, aucune découverte significative de minerai n’y fut faite.
On trouvera une bonne description d’un itinéraire d’accès à la mine de Clot Méné dans l’ouvrage de Jean-Marc Poudevigne [1]. La galerie inférieure est envahie par l’eau à une quarantaine de mètres de l’entrée. L’entrée de la galerie 940 a disparu. La galerie 970 et ses ramifications sont toujours accessibles.
L’exploitation ancienne
Le gisement de Clot Méné affleure entre les cotes 1015 et 1030 environ, au nord de l’entrée de la galerie 970. (La cote de l’entrée de cette galerie varie d’un auteur à l’autre, de 970 à 995 m).
À ce niveau, il est incontestable qu’on rencontre les restes d’anciennes exploitations. Il y reste encore une tranchée de direction SO d’une quinzaine de mètres de large ; le fond en est occupé par des menus. Des trous d’une centaine de mètres cubes montrent sur leurs flancs des plaquages d’hématite, le minerai en ayant été extrait [2].
La campagne d’exploration (1898-1899)
En 1898, Le gisement de Clot Méné fut exploré, depuis son affleurement supérieur, pendant la « campagne de recherches 1898-1899 ». Cette campagne avait été réalisée à la demande de Gabrielle d’Angosse-Borelli alors propriétaire de la concession de Baburet. Selon les rapports de Ingénieurs des Mines [3] , quatre mineurs et deux manœuvres ouvrirent alors de « nouveaux travaux, sur un banc calcaire très fracturé dans lequel est encaissé le filon de fer ». Ces travaux se développent en un seul niveau et forment une galerie tortueuse à six ramifications [4]. On rencontra d’abord sur la droite « une assez grande crevasse naturelle », mais les reconnaissances effectuées en la franchissant n’aboutirent à aucune découverte. Sur la gauche, une galerie de 80 mètres traversa « un gîte de fer irrégulier, encore mal défini ». Du 15 septembre 1898 au 1er avril 1899, environ 200 tonnes d’hématite brune furent extraites et laissées sur le carreau.
Nous empruntons ce plan à JM Poudevigne. Voir le blog des Tachous.
Les tentatives d’exploitation (1938-1940)
En février 1938, la Société des Mines de Baburet y ouvrit un chantier de recherches [5] . Un sentier d’accès de 3 km fut tracé depuis Baburet. On construisit, vers 960 m d’altitude, un baraquement [6]. On y transporta un petit compresseur et on entreprit le creusement de deux travers bancs pour atteindre ce qu’on espérait être le cœur du gisement : la « galerie médiane » au niveau 930 et la « galerie inférieure » au niveau 837, avec une dizaine d’ouvriers en moyenne.
Les travaux furent rapidement « entravés par des entrées d’eau importantes ». Le 31 mai 1938, « à 11 h 40, une mine a explosé prématurément au moment de la mise à feu. Un aide mineur a été tué sur le coup, un mineur et un manœuvre blessés gravement ». En avril 1939, « la galerie se poursuit dans un calcaire rouge semblant annoncer une zone minéralisée ». En mai 1939, le chantier fut interrompu « par suite d’accident survenu au compresseur ». On avait alors percé 249 m de galeries qui n’avaient traversé que des « schistes noirs et durs en partie désagrégés » nécessitant un boisage.
Puis, les travaux furent suspendus jusqu’en décembre 1939, où on commença l’installation d’une canalisation d’air comprimé, de 3 km de long, depuis les compresseurs installés à Baburet jusqu’à Clot Méné. Après un nouvel arrêt des travaux, les tuyauteries furent installées, en avril et mai 1940.
Le plan de développement (1940)
Michel DUPONT [10] a eu accès aux archives de la DRIRE (Bordeaux) qui possède un fond d’archives important des Mines de fer de Baburet.
Parmi les projets envisagés en 1940, on trouve un développement de la mine de Clot Méné. Et la mise en place d’un infrastructure importante pour évacuer le minerai : l’installation d’une voie étroite (0,60 m) de 2500 m de long, aboutissant à un plan incliné de 250 m et un silo de chargement au niveau du Pont de Lafargue. La voie métrique du train de Baburet aurait été prolongée de Ferrières à ce même pont.
Après 1940, des travaux furent poursuivis sporadiquement, sans qu’il soit possible d’en trouver une relation précise, ni même une mention dans les rapports des ingénieurs des Mines .
Le rapport KULBICKI (1948)
Le rapport Kulbicki apporte des précisions sur l’avancement des recherches en 1948 : un étude géologique et minéralogique, des plans et des coupes. Ce rapport d’exploration a été réalisé en 1948 par M. Kulbicki, assistant à la faculté de Toulouse. Il a relancé l’intérêt pour l’exploitation de Clot Méné
Voir le rapport Kulbicki
Ce rapport a été mis en ligne, en 2013, sur le site “Infoterre” du BRGM.
L’avancement des travaux (1948-1952)
On trouve, dans le cahier d’avancements de la période 1952-1962, une « récapitulation des longueurs effectivement creusées ou remises en état » rédigée par le directeur de l’époque, M. Rabat, pour son rapport annuel de 1952. Cette année-là, une dernière campagne de recherche eut lieu du 12 mai au 5 août. Elle permit le creusement de 40 mètres de « dérivations » au niveau 937 et de 14 m au niveau 830.
On avait en même temps [7] entrepris la construction, de Ferrières à Clot Méné, d’une piste de 3,5 km de long, large de 4 m. Depuis le « pont de la mine » à Ferrières, elle suivait la rive gauche de l’Ouzoum qu’elle franchissait au « Pont de la Fargue [8] ». En amont du confluent avec le ruisseau de Laussiès, une passerelle permettait de repasser sur la rive gauche de l’Ouzom et d’accéder à la rive droite du Laussiès. Une deuxième passerelle franchissait ensuite le Laussiès, puis une série de cinq virages en lacets sur une pente abrupte conduisait, par une longue partie rectiligne, à l’entrée de la galerie inférieure. À cette époque, on y faisait circuler un «vieux tracteur [9]» tirant une remorque.
En 1952, le niveau 837 comprenait donc : un travers banc de 341 m, avec deux dérivations de 162 m et 44 m, à environ 205 m de l’entrée. Le niveau 937 (anciennement 930) comprenait un travers banc de 166 m et trois dérivations de 69, 97 et 14 m. M. Rabat précise : « nature du terrain, calcaire partout ».
De 249 m en 1940, on était donc passé à 900 m de développement en 1952 – année où l’on n’a avancé que de 54 m. Entre temps, de 1940 à 1951, on avait donc creusé quelque 600 m de galeries. Au rythme moyen des avancements mensuels – de l’ordre de 10 m par poste de travail – ces 600 m représentaient donc 60 mois de travail à un poste d’abattage.
L’abandon de la mine (1952)
Clot Méné fut donc un espoir déçu : l’exploitation d’un second gîte sur la concession de Baburet aurait pu permettre une augmentation significative de l’extraction. Un travail important avait pourtant été effectué, de 1938 à 1952, pour reconnaître le gisement. L’arrêt définitif des recherches en août 1952 peut s’expliquer par le manque de résultats concrets, aucune minéralisation significative n’ayant été découverte. Le seul indice intéressant était donc celui de l’affleurement de la cote 995, reconnu en 1898-1899, dont furent extraites, à cette époque, à peine 200 tonnes de minerai.
Notes
[1] M POUDEVIGNE. « Randonnées vers les mines du Val-d’Azun », 2022, Éditions Cépaduès, 102 p. pp 74-75.
[2] Rapport de M. Kulbicki, page 2
[3] Arch. Nat. F 14 8339. Procès verbal de visite de la mine de fer de Baburet, 9 juin 1899.
[4] Galerie supérieure à la cote 970. Voir la photographie de H. Saubatte et les plans de M. Kulbicki
[5] Voir les « Cahiers d’avancements », rédigés par les directeurs successifs de la mine de Baburet. Arch. privées.
[6] On en trouve des traces de mur à 25 m environ à l’ouest de l’entrée de la galerie 970. Ce baraquement fut incendié par les Allemands lors de l’expédition de représailles après l’attaque de la mine de Baburet par la Résistance.
Voir : La mine de Baburet pendant la guerre et sous l’occupation allemande.
[7] La piste apparait sur les photographies aériennes de 1951 mises en ligne sur Géoportail. Elle n’existe pas sur celles de 1948.
[8] Ainsi nommé car il franchit l’Ouzom en face de l’emplacement de l’ancienne forge de Louvie.
[9] On utilisait un tracteur Latil. La piste était jugée dangereuse par le pilote du tracteur. Voir M. DUPONT, p. 78
[10] Michel DUPONT. Voie métrique en Béarn : le chemin de fer de Baburet. Numéro spécial hors série, Rail et Industrie, mai 2022, 100 p. pp. 76 -78.
Cet article est extrait de
Émile Pujolle, « La mine de fer de Baburet, de la fermeture des forges à la fin de l’exploitation minière (1866-1962) », Revue d’histoire industrielle des Pyrénées Occidentales, 2006, n° 1, p. 57-92.
Complété en juin 2015 avec des informations extraites du rapport de M. Kulbicki et en août 2022 avec de nouveaux documents.